Roland Héguy (UMIH) : « Il ne faut plus confronter humain et numérique »

À l’occasion de la sortie du livre « Changeons notre tourisme », paru ce jeudi 30 janvier 2020 aux éditions Cherche Midi, TOM.travel s’est entretenu avec Roland Héguy, Président de l’UMIH et auteur de l’ouvrage, pour en savoir plus sur le regard qu’il porte sur la transformation numérique de la filière hôtellerie-restauration et plus largement sur les tendances technologiques émergentes.

Roland Héguy : Depuis 10 ans, je suis assis sur un poste de décision privilégié, j’ai pu observer les mutations importantes. C’est l’enjeu de ce livre que de partager mon expérience par rapport à ces évolutions. Dans notre profession, le numérique s’est imposé comme un outil indispensable. De la création de sites internet dans les années 2000, à l’arrivée des centrales de réservation que sont Booking, Expedia et consorts vers 2006, et plus récemment sur la place qu’occupe le smartphone. De par leur vitesse, toutes ces mutations ont été très violentes pour l’industrie.

Pour autant, je suis très optimiste quant à l’arrivée de la génération Z sur le marché du travail car elle appréhende mieux les enjeux du numérique que ses prédécesseurs. Cela va notamment permettre de booster l’efficacité des communications en ligne. Preuve de son importance pour l’UMIH, le numérique fait partie de l’une des quatre commissions retenues lors de la création, il y a quelques semaines, du Comité de Filière Tourisme pour lequel je représente les organisations professionnelles en tant que vice-président.

Pour faire du numérique un outil vertueux, l’UMIH s’appuie également sur l’écosystème de startups. À ce titre, le Welcome City Lab interviendra lors de la prochaine réunion de la Confédération des Acteurs du Tourisme (CAT) pour favoriser l’échange entre les startups et les organisations. Aujourd’hui, il ne faut plus confronter humain et numérique. Ce dernier permet de mettre en avant la valeur ajoutée de l’humain en lui permettant de se consacrer à l’accueil et au client, et constitue également un formidable levier de développement.

Comment faire en sorte que le numérique profite à l’ensemble de la filière ?

La pédagogie est la clé. L’UMIH réunit plus de 40 000 entreprises allant de la petite auberge de 15 chambres située en zone rurale aux grands groupes tels qu’Accor ou Louvre Hotels Groupe. Ces dernières ont une capacité d’investissement leur permettant de révéler la performance du numérique. Depuis 20 ans, l’UMIH s’appuie sur ces réussites et met en place des relais de formation afin que les plus petites structures puissent en tirer parti également. Aujourd’hui, la qualité ne peut échapper au numérique. Pour autant, la plupart des réussites en la matière sont la combinaison du numérique mis au service de l’humain et couplé à une offre pertinente. Cette prise de conscience touche désormais l’ensemble l’industrie avec des mises en application parfois plus ou moins réussies.

Désormais, les professionnels craignent d’être aspirés par « l’ubérisation ». Cette tendance est incarnée par des plateformes comme Airbnb qui excelle dans l’exploitation du numérique, ce qui peut être à l’origine d’un amalgame. Sur ce terrain, l’UMIH s’appuie sur le levier gouvernemental et a beaucoup légiféré pour que ces sujets ne nuisent pas à l’activité des TPE/PME, comme cela a été le cas pour inciter au retrait de la clause tarifaire imposée par les agences de voyages en ligne. Au niveau européen, l’UMIH est membre de l’HOTREC pour mener des discussions sur des sujets liés au numérique comme la nouvelle réglementation sur la sécurité des paiements (DSP2, ndlr).

Vous évoquez dans votre ouvrage la « robotisation de l’accueil », le « tourisme virtuel » ou encore l’Hyperloop. Y voyez-vous l’avenir du Tourisme ?

Personnellement, je ne peux pas imaginer vivre dans une société où il n’y aura que des bornes. C’est pourquoi je prends l’exemple de cet hôtel entièrement automatisé en Chine. Cela ne constitue pas à mon sens l’avenir du tourisme. J’aime entrer dans un hôtel et être reconnu et me sentir aimé par le personnel. Quel que soit son niveau de performance la machine ne pourra pas m’apporter cette satisfaction. Pour autant, je dis oui à la modernisation entraînée par le numérique. Cela implique néanmoins que l’ensemble de la filière Tourisme, du CAP jusqu’au bac +5, propose des formations d’excellence intégrant une maîtrise totale du numérique.

Quant au discours expliquant que la borne rend le réceptionniste plus disponible, il faut veiller à ce qu’elle ne le remplace pas à terme. Pour autant, je reste optimiste. Toutes les transformations qu’ont connues nos métiers — le développement durable, la place du numérique, la quête de sens dans son travail, etc. — sont autant d’éléments intégrés par les jeunes diplômés qui arrivent sur le marché du travail. Je mise beaucoup sur ces générations et je pense que le meilleur reste à venir.

Hugo Pellegrin- T.O.M

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